Au Revoir Roland !
Mercredi 12 mai 2004
Dernier jus d'orange à l'aéroport
de Rangoon, Roland est stressé !
Quelques heures le séparent de sa
fille et de sa femme. En dix jours, il a
perdu 10kg. Il aura suffit d'un jus de canne
à sucre pris sur le trottoir pour
qu'il attrape une joyeuse turista.
Nous y sommes habitués, voici bien
longtemps que mes reliefs aux toilettes
me font penser à des bouses de vaches,
et que je souffre de crampes au ventre au
moins une fois par jour. Mais, je sais que
je ne suis pas seul dans ce cas. J'ai plus
de deux milliards de potes à travers
le monde qui vivent la même chose
depuis leur naissance, et même bien
pire.
Une fois les adieux fait, nous commençons
à préparer notre séjour
à La Réunion. Nous dînons
ce soir en compagnie de l'équipe
de l'ONG Aide Médicale Internationale.
Dynamiques, engagés (parfois même
enragés) on retrouve tout l'espoir
qui se dégage de leur combat, un
combat qu'ils savent utile même s'il
leur paraît parfois bien difficile.
Ô, Ile merveilleuse,
quand te verrais-je enfin !
Jeudi 13 mai 2004
Aujourd'hui commence notre interminable
trajet vers La Réunion :
10h10 – Nous arrivons à l'aéroport
de Rangoon départ prévu dans
une heure.
15h00 – L'avion décolle enfin
de la piste, nous avons 4 heures de retard,
un coca-cola et deux nems dans l'estomac
("cadeau" pour nous faire patienter…).
19h00 – Arrivée à l'aéroport
de Bangkok.
20h30 – Arrivée dans le centre
ville où nous trouvons rapidement
un hôtel. Nous partons immédiatement
à la recherche d'un billet d'avion
pour Bombay où nous devons prendre
un vol pour l'Ile Maurice (pour être
sur d'avoir un vol, nous avions acheté
ce billet en Inde).
23h45 – Nous laissons 300$ de caution
à l'agence qui vient de nous trouver
in-extremis un billet pour Bombay (via Calcutta)
demain.
Toujours la course
!
Vendredi 14 mai 2004
10h00 – Nous sommes à l'agence
où nos billets devraient être
là !
11h30 – Nous avons les billets en
mains.
12h00 – Nous sommes dans le bus pour
l'aéroport.
13h00 – Arrivée à l'aéroport.
On court s'enregistrer.
14h00 – L'avion décolle pour
Calcutta.
15h30 – Arrivée à l'aéroport
international de Calcutta.
18h30 – Départ de l'aéroport
national de Calcutta (situé à
500mètres de l'autre) vers Bombay.
22h00 – Arrivée à Bombay
à l'aéroport national. Recherche
d'un hôtel.
24h00 – Dodo dans un hôtel pourri
Celui qui touche
la queue de l'avion a gagné !
Samedi 15 mai 2004
14h00 – On est éjecté
de la chambre, on se réfugie dans
le hall de l'hôtel pour continuer
à travailler sur nos PC.
18h40 – Décollage de l'avion
de l'aéroport international vers
l'Ile Maurice.
23h00 – Arrivée à Port
Louis où les douaniers ne veulent
pas nous laisser "entrer" (nous
voulons juste dormir dans l'aéroport
pour repartir le lendemain pour La Réunion)
sans billets d'avion de retour vers la France.
Ils ne veulent, pas accepter nos billets
de retour vers Bangkok…. Tergiversations,
discussions sans fin avec un pantin de bois.
"On va en prison ?" "Oui
! Non !" Ils finissent par nous obliger
à acheter un billet vers la Réunion
(que nous devions de toutes façons
acheter car notre billet Bombay-Maurice
acheté en Inde, il y a un mois, ne
comprenait pas le vol vers la Réunion).
01h00 – Notre billet en poche nous
entamons une nuit sur les banc de l'aéroport,
après une fouille à la douane
(la deuxième en un an) une dernière
engueulade avec la sécurité
qui veut scanner les pellicules photos de
Geoffroy (les rayons X les bousillent, surtout
lorsque c'est le 10ème passage).
Heureusement les pellicules ne contiennent
pas de bombes, ni de lames de rasoir, je
l'ai bien vu et le douanier non plus….
Enfin sur l'Ile
!
Dimanche 16 mai 2004
08h00 – Ouf ! Il restait deux places
dans l'avion, nous pouvons donc nous envoler
pour La Réunion deux heures plus
tôt que prévu.
10h00 – Nous sommes sur l'Ile française
de La Réunion après plus de
4 jours de voyage.
Ici nous sommes royalement
accueillis par Christian Wai Lune et sa
femme Thérèse, des amis de
mon futur beau-père. Christian est
extraordinairement disponible et nous chouchoute
comme ses propres enfants. Il nous a trouvé
un appartement dans le centre de Saint-Denis
et nous invite à dîner dans
sa maison située sur les hauteurs.
Nous passerons la journée du lendemain
à nous reposer et à travailler.
Voilà les
vainqueurs !
Mardi 18 mai 2004
C'est le grand jour ! Les enfants arrivent
ce matin à 8h00 à l'aéroport.
Ils sont là, huit jeunes d'horizons
et d'âges différents. Quatre
filles et quatre garçons, une professeur
(celle qui a encadré le plus d'équipes
gagnantes) et deux accompagnateurs ADP.
L'ambiance est bonne bien qu'un peu tendue,
car les jeunes ne savent pas trop où
ils débarquent. Heureusement, ils
ont la sécurité d'avoir une
personne sur qui compter : leur binôme.
Nous allons directement au centre Jacques
Tessier où nous aurons tous les repas,
et le logement dans une maison créole.
Le temps d'arriver, de s'installer, de se
baigner sur la plage du centre et nous avons
le déjeuner.
L'après-midi, nous visitons l'aquarium
géant où nous verrons presque
les mêmes poissons que dans l'eau
(bon j'exagère un peu …) et
nous essayons de trouver une autre plage
moins piquante… La Réunion
n'est pas réputée pour ses
plages, une fois dans l'eau, vous comprenez
qu'il vaut mieux regarder où vous
posez le pied : à gauche un oursin,
à droite un corail affûté.
Mais équipé d'un masque et
d'un tuba ce cauchemar se transforme en
paradis merveilleux, où une multitude
de poisson de toutes les couleurs vous tournent
autour.
A la rencontre de
l'eau
Mercredi 19 mai 2004
Ça y est, nous commençons
le rythme effréné de visite
en débutant par le chantier de basculement
des eaux d'Est en Ouest.
L'Ile de La Réunion détient
le record du monde des précipitations
à l'Est de l'Ile, où il pleut
parfois plus de treize mètres par
an (à Paris c'est aux alentours de
0,8 mètres par an). Par contre, à
l'Ouest, il pleut moins d'un mètre.
La surface cultivable étant très
limitée sur l'Ile, à cause
des massifs volcaniques qui occupent tout
l'intérieur des terres, il faut donc
irriguer pour augmenter la production.
Le département a donc imaginer un
gigantesque projet de transfert des eaux
de la région Est vers l'Ouest (moins
de 50 km de large) par un tunnel creusé
dans le basalte sur plus de 30km. Projet
fou de 1,115 milliards d'euro financé
à 55% par l'Union Européenne.
L'après-midi, nous visitons une centrale
souterraine de production d'hydroélectricité.
Ici l'eau permet de produire 25% de la consommation
de l'Ile, le reste étant produit
par des hydrocarbures. Tout le monde aimerait
que ce soit plus, mais pour cela il faudrait
créer des barrages et inonder des
cirques volcaniques et ce n'est pas justifiable
écologiquement.
A la rencontre de
l'autre
Petit à petit,
l'alchimie s'opère entre les jeunes
qui se montrent généreux entre
eux, les uns ayant des bonbons, les autres
de la bonne humeur. Le pari est gagné,
mélanger des jeunes d'âges
différents par binômes était
une excellente idée.
Alors il y a d'abord Romaric et Jean-Baptiste
de seconde (16 ans), puis Shaïma et
Kelly de troisième (16 ans), Eloïse
et Diane de quatrième (14 ans) et
enfin Clément et Corentin de cinquième
(13 ans).
Jeudi 20 mai 2004
Aujourd'hui le réveil sonne à
6h00 car nous partons pour le centre de
l'Ile (Cilaos), pour nous y rendre, nous
devons passer par le sud (le centre Jacques
Tessier est à l'Est). C'est la ville
d'origine de Madame Payet, la sénateur
de La Réunion qui a été
membre du Jury. Elle nous accueille gentiment
à notre arrivée alors que
nous sommes encore chamboulé par
l'ascension en minibus sur la route aux
400 virages.
Elle nous annonce qu'après la randonnée
avec notre guide, nous aurons la joie de
mariner dans des bains hydro-massants aux
thermes de Cilaos.
Sortis des bains, Madame Payet, nous invite
à boire un chocolat chaud (il fait
froid dans le centre de l'Ile car nous sommes
à 1200m d'altitude et, situés
dans l'hémisphère Sud, nous
commençons l'hiver) et un gâteau
local. Tout ça au frais de la princesse…
euh de Madame la sénateur.
Les cadeaux et la
plage : c'est sacré !
Vendredi 21 mai 2004
Nous allons enfin commencer une activité
dont les jeunes rêvaient depuis longtemps
: les courses pour les achats de souvenirs.
Nous les ferons au marché de Saint
Paul qui s'étale harmonieusement
le long de la mer. C'est un peu un piège
à touriste ! Mis à part le
magnifique marché aux légumes.
Les souvenirs qu'on y trouve viennent tous
d'Inde ou de Madagascar et sont hors de
prix, mais ils restent quand même
assez représentatif d'un voyage aux
tropiques et satisfont nos jeunes touristes.
Après un repas copieux dans une famille
créole amie de la professeur, nous
allons à la plage pour un repos bien
mérité.
Le soir même nous organisons un BBQ
au centre Jacques Tessier, l'atmosphère
est bonne, bien que tout le monde sache
que le départ est déjà
pour le lendemain.
Et si l'on continuait
avec vous !
Samedi 22 mai 2004
La mort dans l'âme, les enfants décollent
de La Réunion, ils s'échangent
leurs adresses et nous promettent de nous
suivre tous les jours. Nous décollons
le lendemain, d'autres surprises nous attendent.
Le retour à
Bangkok
Dimanche 23 mai 2004
8h00 - Décollage de l'aéroport
Roland Garros de La Réunion
10h00 - On nous annonce que notre avion
est déplacé pour le lendemain
!
11h00 - Nous devions repasser par Bombay,
y dormir (ça c'est le jeu des correspondances
merdiques), puis repartir vers Delhi et
ensuite directement vers Bangkok.
Par chance, Air Mauritius nous annonce,
qu'ils peuvent tout de suite nous transférer
vers Delhi.
13h00 – Après deux heures de
négociation avec une équipe
charmante(le service est réellement
à la hauteur sur Air Mauritius),
nous sommes mis sur le vol du soir pour
Delhi en Business class et arrivé
là-bas, notre hôtel est payé
jusqu'au lendemain, date de notre correspondance.
Et cela en compensation du fait que nous
ne passions plus par Bombay (ça nous
arrange, mais ça, on ne l'a pas dit…)
20h00 – Départ de l'avion de
l'Ile Maurice vers Delhi
Une journée
dans le luxe…ça vous retape
deux hydrotrotters
Lundi 24 mai 2004
2h30 – Un employé de la compagnie
Mauritius est censé nous attendre
à la sortie de l'avion, nous ne le
trouvons pas.
4h00 – Nous finissons par trouver
le fameux représentant de Mauritius
qui nous met dans une voiture de luxe en
direction du Taj Palace Hôtel
5h30 – nous sommes dans notre lit,
dans un hôtel de luxe dans lequel
nous restons 15 heures, juste assez pour
profiter de la piscine et du merveilleux
buffet du restau.
La fin d'une grande
aventure
Mardi 25 mai 2004
00h30 – Nous décollons de Delhi.
7h00 – Arrivée à Bangkok.
12h00 – Nous avons trouvé une
chambre, nous venons de finir notre périple
pour L'Ile de La Réunion. Il aura
duré 14 jours dont 7 de transport.
Mais nous venons de réussir un grand
projet. Quelques chose dont nous rêvions
depuis longtemps : faire partager à
huit jeunes notre quotidien, notre idée
de l'eau.
Et en quelques jours, ils ont vécu
ce que nous vivons quotidiennement :
- Même si l'île est petite,
nous avons passé beaucoup de temps
dans les transports (à cause des
embouteillages).
- Puis il y a eu ces visites, pendant lesquelles
ils ont pu voir à quel point, la
gestion de l'eau est complexe. Ils ont même
vu qu'en France, dans un département
d'Outre Mer, les gens doivent faire des
réserves d'eau, car il arrive que
pendant la saison des cyclones, le réseau
soit coupé. C'est inconcevable pour
nous petits parisiens…
- Ils ont aussi travaillé le soir
pour écrire leurs cartes postales
et les comptes-rendus (chaque binôme
s'occupait de faire le compte-rendu d'un
jour).
- Et enfin et surtout, ils ont vu des paysages
merveilleux et rencontré des "locaux"
avec qui ils ont pu parler de leur vie,
visiter leur maison et manger leur nourriture.
Voilà tout ce que nous vivons avec
beaucoup moins de confort (du à l'organisation
des ADP), mais quelle importance, puisqu'il
reste toujours la satisfaction des paysages
et la rencontre avec une autre culture.
Nous recommencerons, nous en sommes sur.
Que ce soit avec les ADP, sans qui rien
n'aurait été possible, ou
avec un autre sponsor, mais, nous recommencerons
ce concours l'année prochaine.
A Bangkok nous restons
quelques jours pour terminer le travail
monstrueux que nous avons en retard. Mais
ça nous laisse peu de temps car Maman
arrive le 1er juin à Saigon et je
veux surtout retrouver Sophie le plus vite
possible.
L'arnaque à
chaque tournant
Vendredi 28 mai 2004
Nous quittons Bangkok en bus en direction
de Siam Reap où se trouve le légendaire
site d'Ankor Wat. Arrivés à
la frontière, nous sommes censés
trouver un bus cambodgien pour le reste
du trajet. Mais il n'y a pas de bus, juste
un transporteur trop content de voir que
nous nous sommes fait arnaquer. Il nous
propose donc spontanément de nous
"aider" et nous vend à
un prix exorbitant des places à l'arrière
d'un pick-up pourri. Après un trajet
éreintant et dangereux, nous arriverons
poussiéreux mais entiers à
Siam Reap, la ville qui jouxte le site d'Ankor.
Samedi 29 mai 2004
Nous visitons le site khmer d'Ankor à
vélo, le soleil tape dur, mais les
monuments sont fabuleux. Nous restons devant
une incompréhension. Comment une
culture aussi fine, aussi délicate
et évoluée a-t-elle pu disparaître
et laisser place quelques siècle
plus tard au Khmers Rouges, dictature sanguinaire
qui en deux ans et demi a tué plus
de deux millions de ses frères et
continuent à en tuer ou estropier
chaque jour avec les dizaines de milliers
de mines semées sur leur territoire.
Touriste, ici on
vous aime et on vous hait !
Dimanche 30 mai 2004
Nous arrivons à Phnom Penh où
nous commençons les démarches
pour l'obtention du visa vietnamien. Notre
hôtel-agence de voyage nous le promet
pour le lendemain soir. Nous prenons donc
un billet de bus pour Saigon le surlendemain
matin.
Notre passage au Cambodge ne sera pas été
mémorable au niveau découverte
de la population. Ou peut être si,
mémorable de médiocrité.
En effet, le lendemain notre visa n'est
toujours pas fait, nous avons payé
plus cher pour l'avoir lundi, mais ce n'était
qu'un argument de vente malhonnête…
Ce qui engendre une nouvelle dispute avec
des arnaqueurs à touristes. En plus,
par malchance, nous sommes tombés
dans un quartier normalement correct, mais
qui tend de plus en plus à être
réservé aux touristes les
plus médiocres, ceux qui ne viennent
que pour fumer des pétards, de l'opium
ou prendre des pastilles qui font planer
et (en bousillant) bousillent les neurones.
A chaque sortie nous sommes donc harcelés
par des hommes ou des enfants qui n'ont
qu'un mot à la bouche : "quelle
drogue veux-tu ?". Nous sommes parfois
tentés de leur taper dessus. "Pourquoi
me réduis-tu à un drogué
?" " Européen veut-il dire
pour toi : dégénéré
ayant perdu toutes ses illusions, tous ses
rêves, ayant les poches pleines de
billets et une irrépressible envie
de se perdre et d'oublier une vie qui a
perdu son sens ?"
Alors parfois nous nous moquons d'eux et
lorsqu'ils nous demandent "what do
you want ?", nous leur répondons
que nous voulons du "Ketchup",
du "vache qui rit" ou encore du
"fried chicken" et s'ils n'ont
pas compris que nous nous moquons d'eux,
ils repartent dépités de ne
pas connaître la dernière pastille
d'ecstasy à la mode à Paris.
Il paraît que dans la campagne les
Cambodgiens sont adorables, et ailleurs,
en ville, ceux qui ne cherchent pas l'argent
facile des touristes sont honnêtes
et francs… dommage que nous n'ayons
que 14 mois, sinon nous serions partis à
leur rencontre.
Nous sommes souvent confrontés à
ce problème, à court de temps
nous ne voyons que les gens qui sont au
contact des touristes. Ils vivent de ça,
et savent que la personne qu'ils ont en
face d'eux ne reviendra jamais, quoiqu'il
arrive. L'arnaquer et lui prendre le double
ou parfois dix fois le prix réel
n'est pas grave puisque de toute façon
si le touriste accepte c'est qu'il est content
ou qu'il n'a pas le choix, mais c'est quand
même moins cher qu'en Europe (ce qui
n'est plus toujours vrai). Au début,
nous avons cru que ces gens devenaient comme
ça à cause du tourisme, et
c'est faux. Ce sont hélas, les plus
agressifs et les plus malhonnêtes
qui se montrent, et ceux qui sont honnêtes
ne peuvent souvent pas leur faire concurrence.
Ce n'est pas le touriste et ses dollars
qui rend malhonnête le pauvre petit
local. Celui qui vous arnaque est déjà
malhonnête, et il en existe partout.
Même s'ils ont énormément
souffert, la majorité des locaux,
et en l'occurrence les cambodgiens qui sont
dans le top 5 des pays ayant le plus souffert,
restent honnêtes, fiers et ils connaissent
la valeur du travail et de l'argent honnêtement
gagné.
Journal du 12 mai au 02 juin
2004 écrit par Loïc
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