L’adieu à notre soeur
C’est la dernière à
nous quitter. Nous l’avons eue pour
nous tous seuls pendant dix jours. Dix jours
pendant lesquels elle a abandonné
sa petite Aloïse (vieille de 6 mois
et pesant 6Kg) et son mari Olivier (nettement
plus vieux … nettement plus lourd…).
Depuis la passerelle vitrée qui surplombe
les guichets d’embarquement nous lui
disons au revoir. Nous devinons son inconfort,
tiraillée entre l’impatience
de revoir sa famille, et la tristesse de
nous quitter. "Au revoir Marie-Gabrielle,
on se voit dans deux mois à Paris".
Quelques jours
chez un expat
De retour à Beijing, nous sommes
accueillis par Bertrand le frère
de Laure. Laure est une des filles qui fait
le tour du monde : Eau Tour du Monde sur
le même thème que nous et que
Geoffroy connaît depuis longtemps.
La femme de Bertrand étant en France
avec ses quatre enfants pour les grandes
vacances, il en profite pour transformer
sa maison en "maison du bonheur"
et accueille tous les amis et amis d’amis
qui sont de passage. Sa belle-sœur
Sophie, qui fait aussi un tour du monde,
est d’ailleurs dans les lieux pour
quelques jours.
"Alors les gars vous êtes là
jusque quand ?" nous demande Bertrand.
"Hé bien, nous devons faire
notre extension de visa chinois qui expire
demain, ensuite notre demande de visa pour
la Mongolie et on s’en va".
"C’est parfait, cela nous laissera
le temps se faire la grande muraille dimanche".
"Wouaw génial ! On en rêvait,
mais on a un RDV téléphonique
avec Europe 1 à quinze heures, c’est
notre premier et nous devons passer à
l’antenne en direct pendant dix minutes
et cela tous les dimanches pendant un mois".
"Pas de problème, ils n'auront
qu'à appeler sur mon téléphone
portable".
Décision prise, nous allons passer
toute la journée sur la grande muraille
avec un groupe d’expatriés
français déjantés.
La Grande Muraille
Bien que fastidieux, les deux jours de démarches
administratives, sont passés rapidement
et sans problèmes majeurs.
Nous voilà partant de grand matin
pour la Grande Muraille. Comme Bertrand
nous y emmène avec sa voiture, nous
avons la chance de pouvoir aller dans une
partie peu touristique sur laquelle nous
allons marcher toute la journée.
La Grande Muraille est tout simplement surprenante.
Encore un ouvrage colossal érigé
par l’homme. On a d’ailleurs
longtemps prétendu qu’elle
était visible de la lune. En fait,
il n’en est rien, mais cela ne lui
ôte aucun mérite. Elle est
là, posée sur ces montagnes
et on dirait qu’elle se meut tel un
gigantesque train dont on ne perçoit
ni la tête, ni la queue. Elle n’attend
que nous pour partir... Alors allons-y,
embarquons !
La partie sur laquelle nous montons est
en excellent état. Nous sommes à
Jinshanling qui est assez touristique et
nous avons toute la journée pour
faire les dix kilomètres qui nous
séparent de Simatai. Tout de suite,
la muraille s'impose puisque, pour la rejoindre,
il faut gravir la crête sur laquelle
elle est posée. En effet, désireux
de l'utiliser comme protection contre les
invasions barbares, les Mings (plus précisément
l'empereur Hongwu qui a construit cette
section) n'ont pas cherché à
faire dans la simplicité et ont érigé
leur dentelle de pierre en haut de la crête.
Ce qui fait qu'elle passe de col en crête
et de vallée en montée vertigineuse
à travers le paysage accidenté
de la Manchourie. C’en est hallucinant
! Un réel prodige ! On imagine mal
comment des hommes privés de machines
motorisées ont réussi à
construire ce monstre. Mais la facture a
été lourde, ils ont travaillé
à plusieurs centaines de milliers,
souvent au prix de leur vie, pour laisser
un ouvrage phénoménal (la
légende raconte que le remblaie en
dessous de la muraille est fait avec les
corps des travailleurs morts). Il paraît
d’ailleurs qu’a défaut
de protéger la Chine physiquement,
elle a surtout été une magnifique
ligne de vie permettant de transmettre de
tour en tour des informations plus ou moins
stratégiques grâce à
un ingénieux système de fumée.
On est loin de l’Internet, mail il
y a quand même déjà
une vague idée d’information
circulant par paquets sur un support linéaire…
Après avoir parcouru la moitié
du chemin et atteint des zones où
la muraille commence à doucement
se déliter, les Français rentrent
en action et sortent le déjeuner.
Nous rêvons debout !
Devant nous, sur la muraille, juste devant
une tour de garde, Bertrand pose une nappe
en vichy ! Et petit à petit ils nous
sortent des mets délicieux. L'un
a reçu d'un de ses collègues
revenus au pays un saucisson, l'autre un
camembert, un saint nectaire, une bouteille
de vin etc…
Nous n'en pouvons plus ! Voilà 6
mois que notre estomac est malmené
par le piment que nos hôtes ajoutent
à tout les plats ! Et là,
dans ce paysage grandiose, posé sur
ce train fabuleux, voilà que nous
pique-niquons gaiement comme si nous étions
sur la pelouse du château de Chambord.
Quelques heures plus tard, nous avons notre
interview en direct avec Laurent Chabrol.
C'est le stress ! C'est la première
fois que nous sommes en direct, et Europe
1 n'est pas une petite radio.
Tout se passe bien, c’est Geoffroy
qui parle, le début du succès
!
Nous arrivons le soir à
Simatai situé à 10 km. Non
pas parce que nous sommes de mauvais marcheurs,
mais surtout parce qu'avec les tours qu'il
faut quasiment escalader et qui se succèdent
tous les 500m, les sections endommagées,
celles qui ont une pente de 70% (absolument
! Quand je vous dis que les Chinois sont
fous…) et les multiples arrêts
photos, hé bien 10km c'est long !
Adieu la Chine
Nous quittons à regret Beijing pour
plusieurs raisons, d'abord parce que les
Chinois sont géniaux. Nous avons
découvert cette culture et cette
population pleine de vie, pleine d'entrain
et pleine d'humour avec beaucoup de plaisir.
Ensuite parce que nous étions chez
Bertrand dans un grand appartement où
nous nous sentions comme chez nous. A cela
il faut ajouter que nous avions la compagnie
de Sophie (la belle-sœur de Bertrand)
avec qui nous avons échangé
sur beaucoup de thème, ce qui nous
a permis de créer rapidement une
réelle amitié. Et puis tout
simplement parce que même après
plus d'un an de voyage, il est dur de quitter
un lieu…. Qui l'eut cru ?
Le trans-mongolien
Ça y est, nous sommes dedans.
Tout enfant rêve qu’un jour
il mettra le pied dans ce train mythique.
Imaginez ! Un train qui parcourt la Chine,
la Mongolie, la Russie sur plusieurs milliers
de kilomètres.
Des kilomètres de montagnes, de Steppe,
de taïga, de toundra. Devant vos yeux
la fenêtre est comme une télévision
toujours allumée.
Enfin, le soleil se couche à l'horizon
et embrase la steppe qui prend alors des
teintes que nous sommes impatients de voir
assis sur le dos d’un cheval.
Nous partageons notre compartiment avec
un couple d’Israélien qui parcourent
le monde après avoir effectué
leur service militaire. Il s’agit
d’un compartiment comme on peut en
trouver en France, quatre couchettes et
une porte coulissante. Nous pouvons mettre
nos sacs dans un petit coffre situé
sous chacune des couchettes inférieures.
Ainsi durant la nuit, le problème
de la sécurité des bagages
ne se pose pas (en fait nous ne nous sommes
jamais sentis menacés de vol dans
ce train, ni ailleurs, mais nous portions
une attention constante à nos bagages).
Lors de nos déplacements dans le
wagon, nous emportons toujours avec nous
nos petits sacs à dos. Ils sont pleins
d’argent (liquide et traveller's cheques),
d’appareils de photos, de la caméra,
des ordinateurs portables, des passeports.
Bref ils pèsent dix kilos pièce
et nous en avons chacun un (a cela s'ajoute
les 20 kilos que pèse notre gros
sac à dos).
Pour les repas nous nous payons le luxe
de déjeuner et dîner dans le
wagon-restaurant. Il faut dire qu’en
Chine le luxe est à la portée
de tous, car pour deux ou trois dollars,
nous avons un repas chinois à bord
d’un des trains les plus connus de
la planète.
Par contre, pour limiter le coût du
billet, nous avons choisi la formule compliquée.
Au lieu de prendre le Trans-mongolien de
Pékin à Oulan-Bator en direct,
nous avons pris ce train jusqu’à
la frontière mongole, là,
nous avons traversé la frontière
en minibus et nous avons pris un autre train
omnibus de la frontière à
la capitale. Ca n’a l’air de
rien dit comme ça… mais c’est
la galère parce qu’une fois
à la ville frontière chinoise,
il faut trouver un hôtel à
22h, le lendemain, il faut trouver un transport
de la gare au centre ville, et au centre
ville, trouver un transport qui accepte
de passer la frontière avec nous.
A la frontière, c’est le capharnaüm
habituel, puis on arrive dans l’autre
ville frontière, côté
mongol où il faut acheter un billet,
changer de l’argent et attendre le
train. Bref une journée de perdue
pour économiser 40$ par personne.
La capitale mongole
Nous arrivons à Oulan-Bator dans
la matinée où un autre univers
s’offre à nous. Une fois encore,
il nous faut nous échapper du quartier
de la gare pour trouver un taxi qui ne cherche
pas à arnaquer les gens chargés.
Comme d’habitude, nous jouons de malchance
et puis de chance, car après avoir
essuyé le refus de quelques Maisons
d’Hôtes bondées, et nous
être trimbalés dans les rues
avec nos trente kilos sur le dos, nous arrivons
dans un appartement arrangé en Guest-House.
Il s’agit en fait d’un trois
pièces de 40 m² dans lequel
chaque pièce, munie de ses lits superposés,
sert de dortoir, à l’exception
de la cuisine et de la salle de bain bien
sur ! Un peu découragés devant
ce logement plus qu’inconfortable,
nous refusons. Mais à notre grande
surprise, la proprio nous invite à
la suivre et nous emmène dans un
immeuble voisin où elle nous montre
un joli petit appart propret dans lequel
il y a deux lits et deux matelas sur le
sol, une salle de bain et une cuisine. Ravis
de trouver un quatre étoiles au même
prix qu’un dortoir, nous acceptons
avec nos amis israéliens.
Premier contacts
avec un peuple qui nous a tellement fait
rêver.
Notre première visite est pour l’ambassade
de France. En effet, nous sommes en Mongolie
avec la ferme intention de prendre des vacances,
mais nous avons toujours cette petite source
d'eau qui coule dans notre tête. Et
pourquoi ne trouverions nous pas des infos
sur l’eau, juste comme ça,
par curiosité ?!
De plus, nous devons récupérer
nos passeports munis du visa russe, que
notre père nous a envoyé de
France. L’obtention d’un visa
russe étant impossible en Mongolie
nous avons du renvoyer nos passeports à
Paris où notre père s’est
chargé de les porter à l’ambassade
de Russie avec la fameuse invitation d’une
agence de voyage agréée. En
fait, il s’agit d’une invitation
à payer une agence qui se porte caution
de notre voyage… comprenez ce que
vous voulez … Toutes ces démarches
tant onéreuses qu’écoeurantes
ne nous encouragent pas à visiter
la Russie….
Nous sommes accueillis à l’ambassade
par Héloïse, Volontaire Internationale
chargée des relations économiques,
qui nous déclare que l’ambassadeur
lui a explicitement demandé d’accorder
un RDV à tous les Français
de passage qui désiraient le rencontrer.
La chose est entendue, nous le verrons le
lendemain. Et l’initiative fut bonne.
Son excellence Monsieur Nicolas Chapuis
est une vraie mine d’or. Après
nous avoir longuement écoutés,
il part dans un cours magistral sur la problématique
de l’eau et plus largement du développement
durable en Mongolie. Nous sommes attachés
à nos bics et ne loupons rien de
ce qu’il nous dit. Cette entrevue
nous permettra par la suite de mieux interpréter
une culture tellement différente
de la notre.
Faux départ
pour la steppe
Après avoir posé nos surplus
de kilos chez Héloïse (ordinateurs
et quelques accessoires inutiles dans la
steppe) nous décidons de partir pour
l'Ouest du pays en direction d'Uliastaï.
C'est loin, 1300Km, mais pas trop non plus,
juste assez pour être en dehors des
sentiers habituellement battus par les backpackers
de notre espèce.
Mais pour y aller ce n'est pas aussi simple,
les minibus qui vont dans cette région
partent du marché noir, et lorsque
nous y arrivons, il n'y a personne. Le grand
parking est vide, et le marché fermé.
Pas de pot, le mardi ça porte-malheur
de rouler. Alors tout le monde reste chez
soi, sauf les casse-cou. On fait un marché
puis l’autre. Tant pis, nous ne pouvons
pas partir aujourd'hui.
Vrai départ
Rebelote le lendemain matin. Nous avons
plus de chance car après une heure
nous trouvons une camionnette 4x4 UAZ qui
devrait nous conduire à bon port…
enfin si le chauffeur sort la tête
de son moteur…
Nous partons à … 22h ! ! !
Eh oui ! Il fallait le savoir, le chauffeur
attend toute la journée pour compléter
sa voiture et s'il n'a pas assez de monde,
il part le lendemain (il attend que les
clients finissent de faire leurs courses
dans le marché de la capitale qui
est en fait le plus grand marché
de Mongolie. C’est le seul endroit
où l’on trouve de tout et en
quantité, donc on y vient de loin).
S'ensuivent 32h de route avec quelques arrêts
pour réparer, l'autre camionnette
qui roule avec nous, les quelques pneus
crevés et pour nous sustenter.
Nous sommes explosés, pendant tout
le trajet, nous ne pouvons pas fermer l'œil,
ça saute dans tous les sens et dès
que nous nous assoupissons, nous embrassons
gaiement le plafond dans un cri de rage
vers le chauffeur qui roule comme un malade
sur la piste défoncée !
Arrivés à
Uliastaï, la famille du chauffeur nous
héberge et nous goûtons un
repos mérité. Ensuite nous
allons en ville à la station de téléphone
et d'Internet la plus proche. En effet,
nous sommes vendredi et nous devons absolument
trouver, pour dimanche, un accès
téléphonique pour l'interview
d’Europe 1.
Nous en profitons pour chercher des chevaux,
notre intention étant de partir dans
les montagnes pendant quelques jours à
dos de canassons. Mais les chevaux sont
rares en ville et nous nous heurtons invariablement
à un problème de langage.
Les rares Mongols qui parlent anglais commencent
par nous dire « il n'y a pas de chevaux
ici » et finissent par nous proposer
le seul cheval de la région (dans
un pays qui en compte 15 millions…)
pour 100$ par jour ! Ce qui est le prix
d’achat d'un cheval en Mongolie !
!
Nous partons donc le lendemain, un peu fâchés
à avec les Mongols, mais avec la
ferme résolution de ne pas rester
sur cet échec. Après 6 heures
de marches avec nos sacs sur le dos et les
pieds dans une rivière gelée
dans laquelle nous manquons de nous engloutir
tout entier, nous entrons dans une yourte
appartenant à une famille que nous
ne quitterons plus.
La famille de Moux
Il faut peut être expliquer en quelques
mots le cadre dans lequel nous évoluons.
Imaginez une grande vallée entourée
de montagne parfois érodée
par le temps, lisses et recouvertes d'une
herbe jaunie pas le soleil ou parfois accidentées
et recouvertes de grosses pierres. Certaines
sont même couvertes de forêts.
Dans la vallée, une rivière
indécise se divise en plusieurs ramifications
qui, comme pour décourager le voyageur,
se séparent et se rejoignent en formant
un inextricable réseau d'eau cristalline.
Au loin sur une faible pente, une petite
tache blanche d’où sort de
la fumée marque le centre d'une zone
où l'herbe semble bien tendre. C'est
là que nous nous dirigeons hélés
par une bande de gosses jouant près
de la rivière.
Par chance, l’une des filles de la
famille parle quelques mots d’anglais,
complétés par les trois mots
de mongol que nous avons appris et nous
arrivons à leur expliquer notre projet
de promenade à cheval.
Nous tombons rapidement d'accord. Moux,
le père de famille, nous accompagnera
durant les quatre jours. Nous partirons
sur deux chevaux auxquels s’ajoutera
un cheval de bat.
L’accueil
L’accueil inconditionnel des tribus
nomades est toujours le même. Lorsque
vous passez au loin, quelqu’un se
poste devant la yourte et vous regarde utilisant
sa main en guise de visière. Parfois,
luxe extrême, il sort fièrement
de sa poche une longue vue qui n’est
autre qu’une paire de jumelle russe
divisée en deux, et il vous observe
avec attention. Si vous voulez passer au
loin en saluant et ne pas rentrer…
libre à vous ! Mais si vous voulez
vous approcher, on vous invite à
rentrer dans la yourte et à vous
asseoir. On vous sert immédiatement
une sorte de thé au lait qui est
en fait un lait écrémé
dans lequel ils ont jeté bout d’un
pain de thé fumé. Après
trois gorgées, on vous sert du pain
et de la crème fraîche (tsotgii)
ou un petit quelque chose à grignoter
à base de fromage ou de viande.
La yourte est assez simple, elle est organisée
autour d’un fourneau équipé
d’une cheminée métallique
qui sort par l’ouverture située
au sommet de la tente. Car la yourte n’est
qu’une grande tente, composée
d’une structure en bois. Les rayons
de cette grande roue, partent du centre
et on comme vocation de soutenir le toit
et représente symboliquement le soleil.
Suivant la taille de la yourte, deux voire
trois lits sont disposés en périphérie.
Entre les lits on peut trouver, soit des
sacs en toile de jute, soit des armoires,
avec un petit coin prière (les Mongols
sont généralement bouddhistes).
Les armoires ou la structure en bois de
la tente sont colorées d'un orange
couleur minium heureusement décoré
par des motifs de couleur verte, rouge,
grise, jaune. La seule lumière qui
pénètre dans la yourte provient
du puits de lumière crée par
l’ouverture du toit. Les murs sont
constitués de laine de mouton grossièrement
assemblée en énormes couvertures
que l’on recouvre de part et d’autre
d’un tissu blanc et aujourd'hui d'une
bâche en plastique. C’est ce
fameux blanc qui se détache tellement
sur le paysage.
Dans la tente et comme partout d’ailleurs
règne une odeur de mouton, de lait
de yack et de crème fraîche.
A gauche en rentrant vous trouver sous le
lit une tête de mouton fraîchement
coupée. Juste à côté
une bassine en fer blanc contient les viscères,
une autre les pièces de viande et
dans un sac en toile les beaux morceaux
qui sont destinées à être
vendus. Sous l’autre lit on trouve
de la viande séchée et une
panse de yack farcie à la crème
qui est en fait un gros fromage que l’on
garde pour l’hiver. A côté,
une bassine remplie de petit pain et plein
d’autres bonnes choses. Sur une étagère
à droite de l’entrée
quelques ustensiles de cuisine en fer blanc,
une bassine dans lequel on a fait bouillir
le lait de la traite du jour pour en extraire
la crème, une autre pleine de crème
et un plateau que l’on met au soleil
pour sécher le fromage que l'on mangera
en hiver. Parfois à l’entrée
un bidon en plastique armée d’une
batte permet de conserver le lait de jument
transformé en bière, ils appellent
ça Airag, c'est très amère
mais absolument délicieux. Bref,
vous l’aurez compris, qui n’aime
pas le lait de yack, de chèvre ou
de jument, qui n’aime pas la viande,
ne résistera pas à la visite
d’une yourte au fin fond de la Mongolie
sans une réserve de biscuit.
Nous avons adoré. Petit-déjeuner
au beurre de yack, déjeuner à
la crème, thé au lait, bière
au lait de jument, un peu de viande séchée
ou fraîche et en guise de snack toujours
une petite de barre de fromage dur en poche.
Le paradis, même si après quelques
jours on est comme tout le monde…
on fait des cacas blancs….
A cheval
Le cheval est un cauchemar. D’une
part, parce que nous ne sommes pas des cavaliers
nés comme tout bon Mongol vivant
à la campagne (à Ulaan Baatar
nous avons croisé certains citadins
qui ne sont jamais montés sur un
cheval… tout change), d’autre
part parce que nous avons de vraies selles
mongoles, en bois et que celle-ci sont très
inconfortables pour nos petits derrières
d’occidentaux. Par contre le cheval
mongol en lui-même est sidérant,
petit, il est d’une robustesse à
toute épreuve, ils nous trimbalent
durant quatre jours, à toutes les
allures. Ils mangent la nuit, boivent quand
il y a de l’eau et nous emmènent
dans des rochers et des pentes abruptes
où je n’aurais pas osé
m’aventurer à pieds.
Notre guide est charmant, même s’il
ne parle pas un mot de français ni
d’anglais, nous arrivons à
nous comprendre. Il a par contre la fâcheuse
tendance à picoler lorsqu’il
est avec des potes, enfin potes… ici
tout le monde est ami de tout le monde puisque
l’accueil est le maître mot.
L’arrivée
au lac de Tsagan Nuur après deux
jours de cheval est donc douloureuse pour
notre postérieur et douloureuse pour
la tête de Moux qui, après
s'être mis la tête à
l'envers avec notre hôte de la veille,
s'est refait une petite bouteille de vodka
frelatée au petit-dej…
Arrivée au lac, nous sommes de nouveau
accueillit par un ami de Moux qui lui offre
encore à boire. A partir de ce moment,
nous ne reverrons pas notre guide de la
journée et nous le retrouverons le
lendemain avec un très gros mal de
crâne ! Bien fait pour lui ! Le retour
sera plus calme.
Quitter la steppe :
En tout, nous aurons passé quatre
à cheval et quatre jours dans cette
famille mongole à aider à
rassembler les chèvres, sevrer les
yacks, aller chercher de l’eau. Toujours
dans la bonne humeur et le calme. Le jour
de notre départ, Moux nous fait une
belle surprise, il va chercher le bœuf
yack, l’harnache et nous emmène
en charrette avec nos sacs jusqu’à
la ville distante de 8 km. Fabuleux !
Le retour à la réalité
est plus désagréable. Sur
de trouver une camionnette plus rapide qu’a
l’aller, nous embarquons dans une
petite japonaise qui se révèle
être un désastre et qui nous
rappelle toutes les incertitudes de la route.
Après dix heures de route sans histoire,
la transmission casse. En plein milieu de
nulle part. Il est 2 heures du mat, la seule
solution est donc de dormir tranquillement
dans la voiture pendant que le chauffeur
va à pied à la ville la plus
proche (plus de 5 km). Au petit matin, ankylosés,
les yeux bouffis par la fatigue, nous nous
dirigeons avec les 10 occupants de la camionnette
vers une yourte que nous apercevons au loin.
Nous y sommes accueillis sereinement avec
un thé et un petit déjeuner
(lait + pain-crème) puis un déjeuner
constitué de pâtes et de viandes.
« Comment peuvent-ils accueillir tout
le monde de la sorte ? » Nous restons
subjugués devant un tel dévouement
et un tel accueil de l’étranger
de passage. Nous quittons donc le ventre
plein après que le maître de
maison se soit dignement bourré la
gueule devant nous. Triste vie que réserve
les affres de l’alcool.
La suite du voyage est assez monotone, mis
à part quelques arrêts pour
crevaison et un arrêt dans un village
où le chauffeur nous montre avec
fierté une voiture avec laquelle
il a perdu un œil, et s’est balafré
le visage en faisant trois tonneaux. Cela
ne nous rassure guère, il roule comme
un malade, cela fait 40 heures que nous
sommes partis et il n’a toujours pas
dormi.
Nous arrivons après 56 heures de
minibus à la capitale où nous
avons juste le temps de sauter dans un avion
pour Irkoutsk où nous attendent nos
poupées russes.
Journal du 20 juillet au
17 août 2004 écrit par Loïc
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