Bulgarie
Nous ne garderons pas un
souvenir impérissable de la Bulgarie.
L'alphabet cyrillique nous surprend un court
instant, mais ne suffit pas à nous
tirer de nos souvenirs roumains. Ici, plus
aucuns enfants ne nous courent après,
les rues sont désertes, la chaleur
cloisonnant peut être les gens chez
eux. Il y a bien deux ou trois cochons domestiques
en liberté sur la route pour nous
creus
er l'appétit, mais
pas d'enfants qui s'émerveillent
et qui applaudissent lors de nos traversées
de villages.
Seul un pneu crevé vient rompre la
monotonie des kilomètres. En dépit
des appels de phare incessants des voitures
qui nous doublaient, il nous faudra près
de 30 Km pour nous rendre compte que notre
voiture roulait sur 3 roues. Résultat,
une jante défoncée et un pneu
bousillé jusqu'à la trame
métallique. Hé non, ces choses
là n'arrivent pas qu'aux femmes...nous
sommes vexés de cette troublante
découverte.
Le pneu changé, nous reprenons rapidement
la route dans l'espoir d'arriver en Turquie
avant la nuit. Nous faisons une courte halte
à la station Shell de Burgas où
nous dévorons quatre énormes
sandwiches dégoulinant de sauces
diverses et variées. Pendant ce temps,
Adrienne, se fait tranquillement dorloter
par le garagiste qui jure bien de l'avoir
déjà vu nue (comprenez sans
autocollants bien sur) tourner dans un film.
"La Grande Vadrouille ! Louis de Funès
!" s'écrie-t-il subitement à
voie haute.
Nous le regardons estomaqués, ne
sachant quoi répondre. Mais bon sang,
comment la culture française a-t-elle
bien fait pour venir jusqu'ici ? me dis-je
tout bas
Comme vous l'avez sans
doute remarqué, nous faisons pour
la première fois référence
à Adrienne.
Alors qui est Adrienne ?
Adrienne, est le nom que nous avons donné
à notre magnifique voiture.
Pourquoi Adrienne ?
Sans doute à cause de Rocky (film
que nous n'avons jamais vu…) qui dit
"Adrienne rentre à la maison…"
Aujourd'hui les plans sont de laisser l'irrésistible
Adrienne en Afrique, plus précisément
au Cameroun. Mais notre réelle intention
est de trouver un aventurier pour la remonter
à Paris.
Voilà les présentations sont
faites.
Turquie
La frontière turque
jette un froid sur notre désir de
conquête de nouveaux horizons. Pour
la première fois, nous devons affronter
des douaniers qui ne se gênent pas
pour faire du vol en bandes organisées.
Serait-ce un avant goût amer, des
entourloupes qui nous attendent en Afrique
?
Heureusement, cette fois-ci, nous ne serons
pas les têtes de turc de leurs truanderies,
ce sont des Roumains au volant de leurs
Mercedes rutilantes. Pour eux, le passage
en douane, se déroule en deux temps
:
1) On glisse d'abord un premier billet (100
dollars US) dans le passeport, on blague
avec le douanier et on rigole avec lui comme
si on était les meilleurs copains
du monde.
2) Si ce cinéma n'est pas suffisant,
on reprend plus sérieusement la discussion
en changeant de place. On migre de l'autre
coté du comptoir, de manière
à faire sa salade loin des regards
indiscrets. De là, on sort de sa
poche une grosse liasse de biffetons de
100 dollars et on les déroule comme
du PQ, jusqu'à temps d'obtenir un
hochement de la tête du douanier en
signe de satisfaction.
Devant la scène, nous avons du mal
à garder notre sérieux et
pourtant il le faut notre présence
les dérange. Afin de continuer son
business sans nous, le douanier nous réclame
agressivement 2 euros. Je rechigne à
les lui donner pour lui faire gentiment
comprendre qu'il n'aura pas un kopek de
plus de notre poche. Il s'énerve,
je m'exécute car nous avons besoin
de son tampon pour passer la dernière
barrière, qui nous sépare
définitivement de l'Europe.
Deux euro, c'est donc le minimum non négociable
à payer pour passer le poste frontière
turque et avoir des papiers en règle.
No Comment…on s'en sort bien !
Une heure après,
nous faisons halte à Pinarhisar,
non loin de la douane, exténués
d'avoir roulé treize heures d'affilées.
Une petite ruelle éclairée
retient notre attention pour le campement.
Quelques questions existentielles farfelues
nous obligent cependant à rester
sur nos gardes. Comment allons nous être
accueilli par les "Sarrasins"
? Sont-ils carnivores? Deux minutes seulement
suffisent à mettre un terme à
ces interrogations puériles.
En effet, à peine avons-nous parqué
Adrienne, que de jeunes turcs se joignent
à nous. Ils sont 4 et veulent visiblement
faire connaissance avec deux européens
voyageant dans une drôle de voiture.
Ils ne parlent pas l'anglais, nous ne parlons
pas un mot de turc. La communication ne
sera pas évidente, tout dans suggestif
et le non verbal. Les turcs emploient des
mimiques très expressives pour dire
oui ou non. Nous apprenons rapidement à
en faire autant, il suffit juste de se dérider
un peu.
Ils nous offrent de l'eau pour étancher
notre soif et des poires en guise de bienvenue.
Un cinquième turc se joint très
rapidement à notre petit groupe,
puis un sixième, nous décidons
alors de sortir nos bouteilles d'alcool.
La soirée se terminera sur les coups
de 3H30 du matin après avoir goûté
du bout des lèvres, vin et bière
turque.
Lundi 21 juillet, jour
de la fête nationale belge, nous faisons
notre entrée dans Istanbul pour un
court séjour de 8 jours. D'Istanbul
nous ne visiterons rien, pas même
Sainte Sophie, splendeur des croisés…
Nous aurons tout juste le temps de nous
faire voler 50 euro par un vilain cireur
de chaussure et de croiser deux jeunes français,
qui relient en 2 mois, Bordeaux à
Kabul sans carte, au moyen d'une vieille
305. Décidément, ils sont
fous ces Gaulois.
Nous passerons nos huit jours à travailler
comme des turcs… nos engagements,
envers nos partenaires et nos amis, obligent
! Tant pis nous reviendrons à Istanbul
pour notre voyage de Noces… avis aux
amatrices !
Nous quittons Istanbul
le Mardi 29 juillet pour Ankara et plus
loin encore la Cappadoce.
Quatre heures de route suffisent pour couvrir
la distance qui sépare Istanbul de
sa rivale politique Ankara. La capitale
ottomane nous impressionne par son étendue.
D'innombrables constructions neuves poussent
ça et là au grès du
vent, accentuant de fait cette idée
de gigantisme.
La capitale contournée, les portes
de la Cappadoce se dressent enfin devant
nous, montagnes majestueuses entrecoupées
de plaines riches et fertiles. Nous nous
dirigeons vers Kayseri et Ürgüp
villes aux fameuses cheminées de
fées.
La nuit tombant, nous décidons
de nous arrêter dans le premier village
venu pour passer la nuit.
Après une première tentative
infructueuse dans un village, et à
la sortie d'un autre, un type étrange
nous saute dessus. Il est mal rasé,
le visage émacié, trois dents
en moins, mais présente l'énorme
avantage de baragouiner quelques mots d'anglais.
Il porte un tee-shirt crasseux comme les
nôtres, cela nous rassure qu'à
moitié !
"Good night do you want camping"
nous demande-t-il assez brusquement en empoignant
nos deux mains pour nous saluer.
Sa question et son attitude insistante nous
surprennent quelque peu, mais, sans trop
savoir pourquoi et surtout où cette
histoire allait nous mener, nous acceptons
son offre de venir passer la nuit chez lui.
De toutes manières, nous n'avions
guère le choix, notre ami avait déjà
la moitié de son buste dans la voiture
et nous causait non plus du dehors de l'habitacle,
mais du dedans afin d'être plus convaincant.
Faut-il être 24h sur 24h méfiant
et suspicieux vis-à-vis des gens
que nous rencontrons ?
Insh'allah (à la grâce de Dieu)
comme ont coutume de dire les arabes...
ce qui compte ce soir, c est que nous vivions
au moins une fois, une histoire turque,
tant pis pour le reste !
Il nous accueille chez
lui avec pour tout confort, une paillasse
devant la porte de sa maison en torchis.
La coutume veut que l'étranger s'y
assoie en compagnie de son hôte, ce
que nous faisons en veillant bien sur à
retirer nos chaussures.
Pendant ce temps, il lance à sa femme
des mots que nous ne comprenons pas. Deux
minutes après, nous avons à
nos pieds, une tasse de thé, et un
repas composé d'une soupe chaude,
d'un taboulé froid et de galettes
de pain (format crêpe) pour pousser
le tout dans le gosier.
Nous comprenons très rapidement au
cours de la discussion qui suivit ce festin
que notre hôte est en fait très
intéressé.
Mais qui ne l'est pas… ? Même
nous, qui acceptons l'hospitalité
de ce brave homme.
Il veut nous refourguer de la came payable
d'avance, de superbe tapis tissés
par sa femme. A chaque tentative de sa part,
nous faisons naïvement mine de ne rien
comprendre et esquissons pour toutes réponses,
de larges sourires. Après quelques
minutes de ce petit manège, voyant
qu'on était pas très loquace,
notre nouvel ami veut absolument nous offrir
des bières, qu'il part chercher en
voiture, conduit par Loïc.
C'est l'occasion rêvée pour
nous, de sortir notre dernière bouteille
d'alcool, du Rhum agricole de Martinique.
Nous trinquâmes, en l'honneur de l'amitié
Franco-turc, mais découvrons avec
stupéfaction que notre hôte
est un ivrogne, en plus d'être un
marchand de tapis et professeur à
la maternelle du village.
Afin de ne pas devoir boire avec lui, nous
décrétons toujours avec le
même sourire, que nous devons reprendre
la route le lendemain matin tôt. Et
comme il ne tient rapidement plus debout.
Nous allons nous coucher, plus embarrassé
d'avoir sorti la bouteille de rhum, que
content qu'il ne nous saoule plus avec ces
histoires de tapis.
Par précaution nous dormons tout
habillé. La nuit est courte, entrecoupée
par les cris hystériques de sa femme
le sermonnant.
Le lendemain matin nous
quittons notre hôte sans mettre les
petits plats dans les grands.
Nous faisons la rencontre sur les routes
de la Cappadoce avec les premières
peuplades nomades. Ils vivent dans des tentes
ressemblant aux Yourtes des steppes d'Asie
centrale et se déplacent dans de
surprenant side-car. Nous en croisons certains
qui transbahutent jusqu'à 6 personnes,
le père, sa femme et ses quatre enfants…
Nous passons une deuxième
nuit en Cappadoce, mais cette fois-ci, dans
un petit village de montagne, non loin d'Adana,
Turquie Méridional. C'est encore
un professeur qui nous héberge chez
lui, mais, rien avoir avec l'autre, hormis
ce sens aigu de l'accueil commun à
tous les turcs…
Nous dînons comme des rois, la famille
rassemblée en cercle autour de nous
afin de ne pas nous laisser seul. Le père
de famille nous offre une paillasse dans
le salon pour passer la nuit. Il dormira
avec nous, sur le sol, en signe de respect
et d'amitié. Le Lendemain matin,
après un solide petit déjeuner,
nous reprenons la route, direction la Syrie.
Nous sommes le Jeudi 31 juillet 2003.
Journal du 20 au 31 juillet
2003 par Geoffroy
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