Il
nous semble important de préciser
que l'hôtel dont nous allons parler
n'est à conseiller à personne.
Notre mère y a logé pendant
plus d'une semaine, il est bruyant, le service
y est plus que médiocre et le management
tout simplement malhonnête. C'est
acceptable pour un hôtel à
2 euro la nuit, pas pour un hôtel
de luxe… Nous y avons cependant noté
une initiative intéressante qui se
généralise parait-il dans
beaucoup de grands hôtels à
travers le monde.
Interpellé par la
présence d’une petite pancarte
dans la chambre portant le message suivant
en français :
« Chers clients, Chaque jour les hôtels
ont une énorme quantité de
serviettes et de draps à laver. Ce
lavage non seulement utilise une grande
quantité d’eau et d’électricité
mais aussi détruit nos fleuves et
mers par sa vaste quantité de détergent.
Votre décision aux points ci-dessous
sera très indispensable :
- Serviettes et draps de bains jetés
dans la baignoire signifie "Remplacez-les
SVP"
- Serviettes et draps de bain sur le porte-serviette
signifie "Nous les utilisons encore"
Nous vous remercions de nous aider à
sauvegarder notre planète. »
Et d’une autre dans la salle de bain
:
« L’eau est rare, S’il
vous plait, aidez nous à l’économiser
».
Nous avons demandé à rencontrer
un responsable de ce programme et nous avons
interviewé Madame Luong Thi Cal Tu
Responsable de la qualité et Monsieur
Nguyen Van Trung Assistant du directeur
clients.
Il faut peut être aussi préciser
que l'hôtel Majestic est un hôtel
du groupe Saigon Tourist, qui n'est autre
qu'une holding au fonctionnement privé
appartenant au gouvernement communiste.
Certaine des questions que nous posions
représentaient donc des "secrets
d'Etat" et les réponses étaient
donc évasives.
Hydrotour :
Nous avons voulu vous rencontrer, après
avoir remarqué que dans la chambre
de notre mère vous aviez lancé
une campagne de développement durable
axée principalement sur l'eau.
Hôtel Majestic :
Nous allons tout d'abord commencer par vous
présenter l'hôtel. Nous dépendons
de la Holding Saigon Toursit qui elle même
dépend du Comité de la ville
de Ho Chi Minh city. La holding possède
15 hôtels dans le pays.
Ici nous avons 122 chambres, 3 restaurants,
1 piscine, 1 sauna et 1 salle de gym. Nous
employons 203 personnes à plein temps
et 42 à temps partiel. En moyenne
nous recevons annuellement 53532 invités
venant principalement du Japon, Royaume-Unis,
France, USA, Allemagne et Suisse.
Notre programme environnemental a démarré
en janvier 2002. Mais depuis 1995 nous avions
mis en place des systèmes d'économie
d'eau et d'énergie.
H :
Qu'avez-vous commencé en 1995 ?
H.M. : Il y a d'abord eu
la station de traitement des eaux que nous
avons du installer dans l'hôtel pour
avoir droit à nos quatre étoiles.
C’est un standard, un hôtel
quatre ou cinq étoiles doit avoir
son propre système de traitement
des eaux et une vérification quotidienne
de la qualité de l'eau.
La deuxième chose a été
la mise en place du système de clef
en forme de carte de crédit. Cette
carte a un double usage, d’abord elle
ouvre la porte, ensuite, pour avoir de l'électricité
dans la chambre, vous devez l’insérer
et la laisser dans une prise spéciale,
sorte d’interrupteur général.
En sortant, lorsque vous retirez la carte,
vous coupez toute l'alimentation électrique
de la chambre ce qui permet de ne pas laisser
la télévision ou la lumière
allumée lorsque vous n'êtes
pas dans la chambre. (NDLR : on regrette
que ce système ne coupe pas l’air
conditionné qui reste le plus grand
consommateur d’électricité…
mais les clients aiment avoir une chambre
fraîche lorsqu’ils rentrent
le soir.)
H : Quelle
a été votre motivation pour
commencer un programme environnemental spécifique
?
H.M. : La demande a émané
du Comité de la ville de Ho Chi Minh.
Ils ont décidé cela parce
qu'il y a de gros problèmes de pollution
dans la ville, et petit à petit ils
envisagent de sensibiliser les entreprises
puis la population à ces problèmes.
H :
Quelle a donc été le mode
de fonctionnement ?
H.M. : Le management de
l'hôtel est allé voir ce qui
se faisait dans plusieurs autres grands
hôtels à l'étranger
et notamment à Singapour. Nous avions
trois objectifs placés sur le même
niveau d''importance :
- Les déchets
- L'eau
- L'électricité
Les efforts qui sont faits le sont au niveau
de l'économie et du traitement (pour
l'eau et les déchets).
Notre première action a été
la formation de tout le personnel sans exception.
C'est une action importante au Vietnam parce
qu'en général la population
est très peu formée au niveau
environnemental. Nous avons fait appel à
plusieurs entreprises étrangères
et notamment françaises pour ces
formations. Aujourd'hui nous sommes capables
de les dispenser nous même et nous
le faisons d’ailleurs deux fois par
an.
H :
Qu'est-ce que vous entendez par formation
? Economiser de l'eau et de l'électricité,
ce n'est pas si difficile que ça
?
H.M. : Détrompez-vous
! Comme nous l'avons déjà
dit, nous sommes confrontés au manque
de culture environnementale de nos concitoyens
et donc de notre personnel. De plus dans
notre métier le personnel est très
mobile et nous avons souvent de nouvelles
recrues. Il y a bien sur les gestes basiques
au niveau économie de l'électricité
mais cela peut devenir beaucoup plus compliqué
lorsqu'il s'agit d'économiser les
produits chimiques, l'eau ou même
de trier les déchets.
H :
Cela demande plus de travail et plus de
rigueur de la part du personnel, comment
cela est-il perçu ?
H.M. : Très bien
nous avons eu 95% de participation lors
des trois premières sessions de formations
aux pratiques environnementales et à
l'issue de ces formations le management
a reçu de la part du personnel cinq
suggestions intéressantes permettant
de diminuer la consommation d'eau et d'électricité.
De plus, pour motiver le personnel nous
avons mis en place des mesures sur les performances
environnementale de chaque département.
Et nous avons ainsi pu évaluer chaque
département (cuisine, nettoyage des
chambres, lingerie, etc…)
H :
Quelles sont les initiatives que vous avez
mises en place ?
H.M. : La plus récente
est le compostage des déchets organiques
qui a été mis en place il
y a deux mois. Il est fait par une entreprise
extérieure et s'applique à
10 hôtels de Saigon Tourist. Le compost
sera ensuite utilisé dans les jardins
que gère Saigon Tourist.
Il y a eu les fameuses petites pancartes
dans les chambres que nous avons mises il
y a un an.
En 2002 nous avons lancé le programme
pour les toilettes de "chasses d'eau
économiques" qui nous ont demandé
beaucoup de réglages pour être
au point.
Autre chose, qui est d'importance puisque
nous avons trois cuisines, c'est le système
de récupération de l'eau de
rinçage des légumes. Dans
chaque cuisine, nous avons plusieurs éviers
qui ne peuvent être utilisés
que pour laver ou rincer les légumes.
L'eau usée est ensuite envoyée
via des canalisations spécifiques
dans une citerne qui se trouve à
l'arrière du bâtiment. Cette
eau peu sale et ne contenant pas de détergent
est ensuite utilisée pour arrosée
les parterres extérieurs et les plantes
de l'hôtel.
Ensuite il y a le tri sélectif des
déchets.
Toutes les autres initiatives basées
sur l'économie de l'eau, des détergents
et de l'électricité viennent
du personnel et des clients et dépendent
donc de la bonne volonté de chacun.
H :
Quels sont les résultats de cette
politique ?
H.M. : Nous n'avons pas
encore beaucoup de recul étant donné
que les réelles mesures et évaluations
ont commencées en 2002 et ont été
tronquées par le problème
du SRAS (pneumonie atypique) de 2003 qui
nous a valu une diminution importante du
taux d'occupation des chambres. Ce qui fait
que les chiffres ne veulent rien dire, même
s'ils sont positifs. Nous n'avons pas non
plus de retour de la part des clients mais
nous allons en avoir cette année.
Personnellement, nous pensons que nous devons
encore beaucoup travailler parce que le
peu de chiffres que nous avons sont bons
et nous encouragent à continuer dans
la direction du développement durable
basé sur une participation de tout
le monde.
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